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Frédéric-Louis Blanchard

Extrait tiré de: Vivre a malleray au XIXe siècle

↑Frédéric-Louis Blanchard;

Frédéric-Louis Blanchard1

Frédéric-Louis, dit « Conseiller », est né à Malleray le 30 décembre 1790. Il était le fils de David Blanchard et de Suzanne née Feusier et appartenait aux Blanchard de la branche des « Meuniers » (pour la distinguer de la branche des « Gourbachons », ou « Maçons » ou « Fils » issue d’un enfant illégitime) qui était de loin la famille la plus riche du village au début du XIXe siècle. En 1854, Frédéric-Louis était encore le plus grand propriétaire foncier de Malleray2.

Comme la plupart des adolescents de cette région du Jura, Blanchard a passé quelques temps dans une famille suisse-allemande de la région bernoise3. En 1809, il tira au sort pour la conscription et fut d’abord réformé pour défaut de taille. Rappelé en 1813, il fut cette fois reconnu apte. Il partit en novembre de la même année pour Colmar où on l’intégra au 13e régiment de la jeune garde impériale avec laquelle il fit, comme voltigeur, la campagne de Belgique sous les ordres des généraux Maison et Roquet. Blanchard prit part à la défense d’Anvers et assista au combat devant Courtray. Avec l’armée de défense des frontières du Nord, il parvint à gagner Lille où, après l’abdication de Napoléon, il resta en garnison jusqu’en juin 18144.

De retour à Malleray, Blanchard partagea dorénavant son temps entre les travaux des champs, la menuiserie et la charpenterie, ses fonctions de secrétaire de commune et l’armée, où il fut nommé fourrier après son instruction à Berne en 1817. Il est mort à Malleray en 1880.

Parmi les diaristes de Malleray, Frédéric-Louis est certainement celui qui écrivit le plus et avec la plus grande régularité. Il commença à tenir son journal, qu’il intitule lui-même Livre de remarques de tout ce qui se fait durant l’année, en 1809. Interrompit-il ensuite son ouvrage, de lui-même ou en raison de circonstances extérieures? Rien ne nous permet de le dire! Toujours est-il qu’aucun document ne nous est resté pour les années 1810 à 1813. Son séjour dans les armées françaises de novembre 1813 à juin 1814 lui a inspiré, en revanche, un récit intitulé Mémoires d’un voltigeur. Son Livre de remarque recommence ensuite depuis 1815 et, dès lors, Blanchard écrivit très régulièrement jusqu’en 1870. Durant les dix dernières années de sa vie, il semble avoir cessé de tenir son journal. Mais, dans ce cas-là aussi, ses manuscrits ont peut-être disparus car Frey le cite encore en 18765.

L’ensemble des Livres de remarques de Blanchard se compose de 56 cahiers non-reliés. Les manuscrits semblent avoir été conservés pieusement dans la famille que l’on appelait les « Conseillers », d’après le surnom de Frédéric-Louis. Ils se trouvent aujourd’hui parmi les documents du fonds Auguste Blanchard des archives de l’ancien Évêché de Bâle grâce à un don que firent ses descendants en 1971. Chaque cahier relate les faits d’une année et se termine par une invocation à Dieu qui est en même temps une sorte de bilan des événements les plus importants. Par exemple, le cahier de 1815 s’achève ainsi: «Dernier jour de l’année. Elle s’est terminée par un temps fort doux, il n’a pas beaucoup neigé. Cette année a vu couler beaucoup de sang, elle est remarquable par les événements qui sont arrivés, enfin elle nous a assurez (sic) d’une paix solide et durable. Puisse le Tout-Puissant la prolonger longtemps et nous conserver ainsi dans un état paisible et tranquille. Amen».

Blanchard écrit jour après jour, y compris le dimanche, dans une calligraphie fine et soignée. De plus, sa langue frappe par sa correction orthographique et syntaxique. Ses Livres de remarques renseignent avant tout sur les conditions et les variations atmosphériques ainsi que sur les travaux que l’auteur a exécutés pendant la journée. Plus rarement, il nous parle également des occupations journalières des membres de sa famille ainsi que de la vie politique ou sociale de la communauté. Quant aux événements exceptionnels (maladies, morts, guerre, etc.) qui viennent bouleverser son foyer, son village ou sa région, Blanchard les mentionne presque toujours mais le plus souvent fort brièvement. Certains d’entre eux néanmoins font l’objet de comptes-rendus ou de descriptions inattendus de sa part. Il en est ainsi, par exemple, de l’accueil de Leurs Excellences en 1815 ou encore de la cérémonie de remise de l’Évêché au canton de Berne en 1818. Ces récits exceptionnels donnent à eux seuls une valeur certaine aux écrits de Blanchard.

Mais, l’intérêt des Livres de remarques se situe essentiellement dans la continuité, la régularité et la durée d’écriture de leur auteur. Ils pourraient se révéler particulièrement précieux pour l’étude des transformations politiques, sociales et économiques intervenues à Malleray en particulier et plus généralement dans le district de Moutier dans le courant du XIXe siècle6.


1 Sur Frédéric-Louis Blanchard, voir C. Frey, Histoire et chronique de Malleray, p. 71-75; article nécrologique du « Démocrate » du 7 janvier 1880 (C. Frey, livre IV, p. 179, fonds Frey Vevey); Mémoires d’un voltigeur (AAEB, fonds Blanchard ou copie C. Frey, livre IV, p. 170-178, fonds Frey Vevey).

2 STAB, 320b 2/4 matrice de rôle de la commune de Malleray. Blanchard possède en 1854 75 journaux 207 perches 27 pieds d’une valeur imposable de 7168 livres. En comparant les écrits de Faigaux fils et de Blanchard, on y découvre encore d’autres signes de cette richesse. Blanchard possédait deux attelages de boeufs et deux chevaux alors que Faigaux ne possédait qu’un attelage de boeufs.

3 Livre de remarques de Blanchard, le 22.6.16: «Je suis allé à Getelen (sic) chez mon ancien maître des allemands» (sic).

4 Pour plus de détails, voir Mémoires d’un voltigeur, AAEB.

5 C. Frey, op. cit., p. 218-219.

6 La brève et très incomplète analyse que nous donnons des Livres de remarques de Blanchard ne porte que sur une étude succincte et fragmentaire des cahiers de 1815 à 1818. Nous n’avons pas eu le temps de consulter l’ensemble.

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